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- Réforme des retraites
Emmanuel Macron laisse planer la menace d’une dissolution en cas de motion de censure contre le gouvernement. Mais ce n’est pas la seule arme constitutionnelle à sa disposition pour tenter de faire adopter sa réforme des retraites.
ParRomain Imbach
Temps de Lecture 4 min.
La mise en cause de la responsabilité du GouvernementDALLOZ Etudiant - Actualité: Point sur la motion de censure
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Le gouvernement planche, depuis la rentrée, sur la meilleure option pour faire passer son projet de réforme des retraites, alors qu’il ne dispose pas d’une majorité absolue àl’Assemblée nationale (250sièges pour les députés des groupes Renaissance, MoDem et Horizons et apparentés, pour une majorité absolue fixée à 289sièges).
Jeudi 28septembre, le ministre du travail, Olivier Dussopt, a affirmé sur LCI que le président de la République Emmanuel Macron n’exclurait pas une dissolution si le texte était bloqué par une motion de censure au Palais-Bourbon.
Une possibilité offerte par la Constitution de la VeRépublique, qui donne aux députés le pouvoir de renverser le gouvernement, mais aussi au chef de l’Etat celui de dissoudre l’Assemblée nationale et de convoquer de nouvelles élections. Ce qui instaure entre l’exécutif et l’Assemblée une relation réciproque de «vie ou de mort».
Qu’est-ce qu’une motion de censure?
Il s’agit de l’arme parlementaire qui peut renverser le gouvernement. Aux termes de l’article49, alinéa2 de la Constitution de 1958, l’Assemblée nationale peut mettre «en cause la responsabilité du gouvernement par le vote d’une motion de censure». L’existence quasi-permanente, sous la VeRépublique, d’une majorité stable et favorable à l’action du gouvernement a, jusqu’à présent, rendu ce scénario très improbable. Mais le paysage politique morcelé issu des législatives de juinle rend désormais moins impossible.
Le dépôt d’une motion de censure du gouvernement nécessite la signature de 58députés. Un contingent dont disposent plusieurs groupes d’opposition – La France insoumise (LFI), LesRépublicains (LR), le Rassemblement national (RN) et l’intergroupe de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes).
Une fois déposée, la motion de censure doit être examinée dans un délai de quarante-huit heures puis soumise au vote de l’Assemblée nationale. Seuls les députés qui y sont favorables votent, une abstention étant considérée comme un soutien au gouvernement.
Pour renverser le gouvernement, il faut obtenir un vote favorable à la majorité absolue, soit 289députés. Compte tenu de la composition de l’Assemblée nationale, cela nécessite que la quasi-totalité (88%) des 327députés de l’opposition, du RN à LFI, en passant par LR, s’accorde sur ce texte. La dernière motion de censure, déposée par l’intergroupe Nupes le 6juillet comme un vote «de clarification politique», a été rejetée, avec seulement 146votes pour.
Lire aussi : Quels sont les députés qui ont voté la motion de censure présentée par la Nupes à l’Assemblée?
L’histoire de la VeRépublique ne contient qu’un seul exemple de motion de censure ayant abouti: le 5octobre1962, en réaction à la proposition du général de Gaulle d’instaurer l’élection du président de la République au suffrage universel direct. L’adoption de la motion a forcé le gouvernement Pompidou à démissionner, conduisant DeGaulle à dissoudre l’Assemblée nationale dans la foulée.
Le Monde
Soutenez une rédaction de 550 journalistes Accédez à tous nos contenus en illimité à partir de 7,99€/mois pendant 1 an. S’abonnerSi une motion de censure constitue un revers politique majeur, elle n’oblige aucunement le chef de l’Etat à dissoudre l’Assemblée. Ce dernier peut tout à fait composer en nommant un nouveau gouvernement et négocier ou reporter certains projets de loi.
Pourquoi dissoudre l’Assemblée nationale?
En vertu de l’article12 de la Constitution, le président de la République peut dissoudre l’Assemblée nationale après consultation du premier ministre et des présidents des deux Assemblées (nationale et Sénat). De nouvelles élections sont alors organisées dans les vingt àquarante jours. Pour utiliser à nouveau cette possibilité, le chef de l’Etat doit toutefois attendre aumoins un an après les élections législatives suivant la dernière dissolution.
La dissolution permet à l’exécutif de pallier des situations de crises ou de blocages institutionnels, comme ce fut le cas en1962, 1968, 1981 et 1988, en raison de discordance entre la majorité parlementaire et l’exécutif (le président étant à l’époque élu pour sept ans et les députés pour cinq, de telles discordances arrivaient plus fréquemment). La dissolution de 1981 était, par exemple, une étape indispensable pour François Mitterrand afin de disposer d’une majorité après son élection.
Mais cette «arme constitutionnelle» peut provoquer l’effet inverse de celui escompté. Ce fut le cas en1997, lorsque le président Jacques Chirac, qui voulait conforter sa majorité àl’Assemblée, provoqua de nouvelles élections – aboutissant au contraire à une majorité de gauche et à une cohabitation avec le gouvernement du socialiste Lionel Jospin.
La resynchronisation du calendrier des élections législatives et présidentielle, en2000, arendu le recours à la dissolution moins probable, en offrant systématiquement une majorité parlementaire au nouveau président dans la foulée de son élection… jusqu’à 2022.
Comment fonctionne le 49.3?
Lorsqu’un projet de loi aussi controversé que la réforme des retraites est examiné àl’Assemblée nationale, les députés de l’opposition tendent à multiplier les amendements, et les allers-retours avec le Sénat, pour prolonger le débat. Le gouvernement a alors la possibilité de «passer en force», en ayant recours à l’article49.3 de la Constitution, qui permet d’adopter directement la réforme.
En effet, l’alinéa3 de l’article49 permet au premier ministre, «après délibération du conseil des ministres», d’«engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale» sur le vote de certains textes. Lorsque le chef du gouvernement engage cette procédure, les députés ont la possibilité de déposer une motion de censure dans les vingt-quatre heures. Si elle est votée à la majorité, la loi est rejetée et le gouvernement est renversé. La logique veut alors que le président dissolve l’Assemblée et convoque de nouvelles élections.
A l’inverse, si la motion de censure est rejetée, le gouvernement gagne son pari: la loi est adoptée et part au Sénat. Elle reviendra ensuite à l’Assemblée pour une deuxième lecture, lors de laquelle le gouvernement pourra de nouveau activer le 49.3 s’il le souhaite.
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le recours au 49.3 est limité à un seul texte de loi par session parlementaire, à l’exception des projets de loi de finance (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour lesquels le gouvernement peut y recourir sans limitation.
Lire aussi Les mots pour comprendre le fonctionnement de l’Assemblée nationale: dissolution, motion de censure, commission mixte paritaire
Rectificatif le 1er octobre 2022: suppression d’une mention erronée à propos de la dissolution et précision à propos du délai pour recourir une seconde fois à la dissolution.
Romain Imbach
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